Confrontations entre Générations




Il n’y a pas de conflit de générations inéluctable

Les mythes du conflit des générations, et ceux de l’ancien qui sait, qui transmet son savoir à un jeune avide de savoir, et du jeune à potentiel et de l’ancien, rigide et cramponné sur ses certitudes, ont fait long feu. Ces fantasmes sont des constructions psychiques dont il convient d’examiner la fonction de perpétuation des forces de conservation, et de résistance au changement au sein des personnes comme de l’entreprise et au niveau social.

En psychologie, le puer (le jeune) et le senex (le vieux) sont des polarités psychiques opposées et ambivalentes.
Dans leurs côtés positifs, le puer représente le potentiel, le renouveau, la vivacité, et le senex l’ordre, la rationalité, la lenteur et la puissance de réflexion, la sagesse qui vient des leçons tirées de l’expérience vécue. Dans leurs aspects négatifs, le puer personnifie l’impulsivité sans freins, la soumission au principe de plaisir, le senex la vieillesse stérile, la tristesse, et le refus du changement

A un niveau sociétal et entrepreneurial plus large, le puer dans son acception positive est la représentation de ces moments où on prend des risques, on fait confiance aux possibles, aux ressources plus inconscientes et moins cartésiennes, où on étreint le changement. Ces moments où nous sommes capables de cultiver l’incertitude. Le senex, c’est la sagesse accumulée d’une culture, et incorporée dans ses lois et ses institutions..

Puer Aeternus by Nkimadams
Puer Aeternus by Nkimadams
Nous sommes tous jeunes et vieux à la fois. L’enjeu pour les cadres dirigeants et les managers, c’est de ne pas développer une attitude unilatérale, et de chercher une unité dans ces contraires, pas un juste milieu. En termes de développement personnel et de management, la clé est d’activer l’un et l’autre dans un processus d’interaction réciproque, pour que s’allient sagesse et créativité.

Il n’y a pas de conflit de générations inéluctable. Il est plus difficile pour le dirigeant d’entreprise ou le manager arrivé à un certain âge de rechercher à développer certaines zones en friche (cf. dialogue intérieur comme outil de coaching cliquez ici), de (re)trouver cette créativité dont l’entreprise a tant besoin, que de donner des conseils aux jeunes en se considérant comme leurs guides.

En s’appuyant sur sa pratique des transformations individuelles et collectives en entreprise et sur son expérience clinique, Catherine Farzat aide les Directions à développer une réflexion partagée, les cadres dirigeants et les managers à travailler autrement et à critiquer stéréotypes et idées reçues qui entravent la créativité et le développement de l’entreprise.

Le rôle des dirigeants et des managers

Le rôle des dirigeants et des managers n’est pas de soutenir, particulièrement en France, une culture qui exalte la jeunesse tout en négligeant et humiliant la jeune génération (cf. les multiples stages sous-payés, souvent de véritables missions, proposés aux jeunes ; cf. dans la gestion de la « masse » salariale, le fameux GVT – glissement vieillesse technicité – jargon bien connu des RH et des dirigeants : un senior parti peut être remplacé à bien moindre coût par un jeune : TGV pour une gestion catastrophique de la pyramide des âges) mais d’explorer comment ils peuvent/veulent apporter leur marque à l’entreprise et dans leur activité professionnelle. Le mot caractère vient d’ailleurs du grec kharassein qui veut dire graver, esquisser ou inscrire. Il s’agit de l’ensemble des traits propres à un individu, à l’opposé de l’image que l’on veut donner de soi aux autres (cliquer ici).

Se pose pour les « anciens » la question : « qu’est-ce que j’ai envie de transmettre ? ». Transmettre n’est ni conseiller, ni former. Se pose pour les jeunes la question de savoir recevoir, la frénésie de consommation remplaçant le temps long de la transmission, au point que l’idée même de tradition paraît suspecte aux yeux de certains jeunes.

La lutte des places (cliquer ici) entre une jeune recrue supposée mercenaire et l’expert ou le manager attaché – affectivement et physiquement ! – à l’entreprise n’existe que lorsque chacun des protagonistes s’agrippe à ses affects (vécu d’humiliation, de revanche, d’impatience pour le jeune ; agrippement à des principes, à un statut, etc…, pour le plus âgé) et à ses manières de travailler.

Nous sommes obligés de revoir de manière critique notre propre vision du monde

Les jeunes veulent travailler autrement. Et interpellent les anciens dans leurs tentations à se conforter dans des habitudes. Chacun doit apprendre à travailler ensemble, autrement et en compatibilité avec son histoire, son caractère, et les objectifs de l’entreprise. Il s’agit aussi de différences de technologies. Le printemps arabe nous a montré que des tyrannies réputées inexpugnables pouvaient s’effondrer et que l’espoir pouvait renaître. Certes tout reste à bâtir, mais nous sommes obligés de revoir de manière critique notre propre vision du monde, car les paradigmes d’hier ne sont plus opérationnels aujourd’hui.

Le magnifique discours de Monsieur Michel Serres, de l’Académie Française, le 1er mars 1911, à l’occasion de la séance solennelle qui s’est tenu à l’Institut de France sur les nouveaux défis de l’éducation est une illustration exemplaire de cette possibilité d’unité entre ces contraires que sont jeunesse et vieillesse, et du défi qui nous attend. Je me permets de vous inciter à cette excellente lecture : www.institut-de-france.fr/education/serres.html

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